Les tags c’est la ville ?

Jour 5 – Je ne connais pas assez la vie des villages pour affirmer qu’ils y sont présents en nombre, ou pas, discrètement ou pas. Au début, leur présence dans la ville avait un goût de liberté, de révolution, ou tout simplement de protestation. L’élaboration et la beauté de certains d’entre eux, leur côté éphémère, leur récurrence ont conduit à la naissance d’un mouvement artistique : l’art urbain ou street art. Mais la masse des tags ordinaires qui couvrent les murs de la ville, peu de gens y prêtent encore attention, ils sont là, ils se sont fondus dans les murs et les façades. Et puis il y en a un qui t’éclate presque à la figure, quand tu navigues le matin dans le gris de la ville, dans ton brouillard intérieur qui ne s’est pas encore levé, des lettres, des graphismes, tu ne sais trop, jaune pétant, rouge pétant, qui se détachent sur fond de vieille porte de garage à lamelles, grises évidemment. La couleur est là, partout. Il suffit d’ouvrir les yeux.

Logik

Ceci n’est pas une gare, même pas une gare désaffectée. Cela s’appelle une halte, un point d’arrêt non géré à accès libre, mais ça tu ne l’as découvert qu’après. Avant, il y avait une gare, une vrai, avec un bâtiment, peinture blanche et tuiles rouges, une vraie petite gare de campagne puisqu’avant, là, c’était la campagne et donc, elle a fini par être fermée en raison d’un manque de fréquentation, ensuite les travaux d’un futur RER qui n’en finissent pas d’être planifiés, interrompus avant d’être commencés, puis reportés, poursuivis, non terminés avant une hypothétique mise en service sans cesse différée et comme résultat ça donne une gare qui n’en est pas une où seuls les habitués doivent savoir comment elle fonctionne, tu as vu après une femme traverser la grande avenue en surplomb avec une valise à roulettes sortant probablement de cette halte, encore que tu ne l’as pas vue en sortir, une gare où il ne fait certainement pas bon circuler seul.e le soir, à peine si on s’y sent à l’aise en journée, un rayon de soleil ça aide comme ce jour-là où tu décides d’y aller voir de plus près, tu ne savais pas ce que tu allais y trouver : un chantier non terminé, des tas de gravats, de sables, des balustrades provisoires, des tags, quoique oui, ça tu pouvais t’attendre à en trouver, des clôtures de chantier mobiles, des flaques, le plafond goutte, déjà des réparations à effectuer avant même la fin des travaux, des quais immenses, un train qui passe sans ralentir, tu parviens à le saisir dans la seconde, la vitesse énorme, la photo soustrait cette réalité-là, le train semble à l’arrêt, tu es sur la voie 4, tu te dis que celle d’en face ce doit être la voie 3, les voies 2 et 1 ne semblent pas encore exister, tu ne les as pas vues, sans doute devraient-elles à terme émerger des tas de sable et de gravats qui longent le mur qui te fait face. Cela paraît logik…