D’habitude tu ne t’y rends pas le samedi. Une réunion indirectement liée t’a amenée dans ton quartier de travail. Les immeubles sont en retrait dans une brume qui ne s’est pas dissipée de la journée. Les reflets se confondent dans les vitres qui font écran et se répercutent timidement. Des cyclistes bravent le froid mordant et longent les quelques bandes de neige persistante, figée par le gel. Tu te demandes où ils vont, ils semblent aller tout droit vers ces bâtiments qui s’effacent dans leur halo de mystère. Ou bien se dirigent-ils vers cette lumière qui les surplombe et se glisse entre leurs silhouettes vaporeuses ?

La salle de réunion offre une vue sur le quartier, que tu ne connais pas. Des maisons aux toits enneigés calfeutrées au pied de l’immeuble fantomatiques, comme jadis autour d’une église. Une fin d’après-midi aux contours incertains, rien ne bouge. On se demande même si ces maisons sont habitées.


Une fenêtre illuminée comme en écho au halo des réverbères. La brume a tendu la main à la nuit. L’une s’est coulée dans l’autre, comme pour toi hier, mais pour l’heure, tu regardes ces bâtiments que dans leur éclairage nocturne tu vois sous un autre jour. Tu plonges dans la station de métro. Tu es passée devant le Kitty O’Shea et tu te dis qu’un de ces quatre tu viendrais bien y passer une soirée.


